Chronique 2012-32 du Capitaine: Skorpios

Ayant décidé de demeurer dans la baie de Vlikho dû à la météo annoncée, je prends le dinghy pour aller visiter le village. Premier défi : trouver un endroit où accoster. Je suis probablement trop respectueux des propriétés qui ne sont pas miennes, mais j’ai vraiment de la difficulté à trouver mais j’y parviens finalement. Deux rues dont la route principale qui passe sur le bord de l’eau, quelques restaurants, deux mini-marchés, un B&B et quelques maisons sans oublier le club nautique de Vlikho, endroit charmant où je fais la connaissance de 3 Néo-Zélandais. Le bateau appartient à Peter qui l’a acheté à Annapolis il y a déjà 7ans, qui l’a traversé ici et navigue en Méditerranée depuis.

Tout en faisant connaissance autour d’une bière et d’un repas, ils se préparent à quitter pour l’Adriatique avec l’intention de revenir hiverner le bateau ici pour l’hiver. Nous nous quittons en soirée avec échange de courriel et un beau gros morceau de thon qu’ils ont pêché la journée d’avant.

Mardi matin il est 7 heures et pas de vent. Je décide qu’il est temps pour moi de trouver un mouillage où l’eau est claire et où je pourrai me baigner et faire cuire ce thon pour déjeuner. Une heure 45 plus tard, je dis bonjour à des Québécois de Montréal, seul autre bateau dans cette idyllique baie de l’Île de Skorpios, eh oui l’île de feu Onassis, mais qui appartient encore à la famille et qui est privée. Je peux quand même m’ancrer dans 6 mètres d’eau à l’extérieur des bouées qui délimitent la plage et où nous ne sommes pas autorisés à aller.

Première baignade. Je me rends sur Entracte II, voilier de Francine et Jean-Claude. Nous faisons connaissance un peu et je retourne sur Nomade à la nage. Après avoir mangé l’excellent thon, une autre baignade. Maudit que ça fait du bien! Je crois que je vais demeurer ici pour la nuit. Seul problème, ma clé internet ne fonctionne plus, je verrai un autre jour.

Troisième baignade et j’en profite pour nettoyer un peu la coque. Après 3 mois à l’eau ça paraît et plein de petits poissons tout autour. J’y pense, ma caméra est étanche à l’eau pour 3 mètres, c’est le temps de la vérifier. Aussitôt dit, aussitôt fait! Vous pourrez voir le résultat, mais l’eau était encore un peu embrouillée due au frottage de la coque.
Ce soir, je suis invité à souper sur Entracte II et j’ai décidé de demeurer ici pour la nuit.

Très belle soirée avec un très bon souper. Nous avons réinventé le monde; ok, juste le Québec, mais toujours avec le plaisir de parler de la maison et d’espérer un monde meilleur.
Lever à 7h, baignade 7h01, maudit que ça du bien! eau cristalline, 5 bateaux dans la baie, une mer d’huile, personne dehors encore…

Déjeuner, un au revoir à Francine et Jean-Claude et je quitte direction Cléopâtra Marina où je pense sortir Nomade de l’eau jusqu’au printemps. Pour moi, cette vague de chaleur est trop désagréable. Après une ou deux semaines d’entretien sur le bateau, je devrais être de retour à la maison. C’est toujours plaisant de revenir à la maison. Enpassant, c’est aujourd’hui qu’Hailey notre petite-fille a 1 an. Bonne fête Hailey xxxx

Ce diaporama nécessite JavaScript.

Les Italiens et le foot: manifestation d’une culture bien vivante

Eh oui, on le savait : les Italiens et le foot ne font qu’un. Mais hier soir, nous avons vécu une expérience unique et bien spéciale. Nous avons décidé d’aller prendre une marche vers 21 heures. À la sortie du port, pas d’âme qui vive dans les rues, comme si la ville avait été évacuée. Presqu’aucune voiture circulait alors qu’en temps normal, le trafic est incessant. Nous nous disions que c’était bien tranquille pour un dimanche.

Puis, nous avons entendu des clameurs. En nous promenant au hasard des rues, nous avons commencé à voir des gens attroupés aux terrasses, aux restaurants, dans les parcs et sur les trottoirs. Ils sortent un téléviseur, parfois un écran géant (surtout dans les commerces), et ils regardent une partie de foot, silencieux entre les moments de fébrilité. Rien n’aurait pu les arracher de l’écran, si ce n’eut été d’un tremblement de terre ou de l’Etna qui explose.

Si au Québec le hockey est une religion, ici le foot est une conversion, une secte qui relie le peuple entier! Les Italiens aiment se regrouper non pas parce qu’ils ne possèdent pas de poste télé à la maison, mais parce que le foot se vit en gang. Dans les parcs, les rues, le port, à chaque endroit il y a un attroupement et un profond respect pour l’événement en cours.

Voilà une différence entre notre peuple et le leur. Au Québec, certains Québécois se font un party lors des séries éliminatoires de hockey, mais cela se fait généralement à l’intérieur. Certains restaurants ont des écrans géants (comme la Cage aux Sports), mais on ne voit jamais les gens sortir leurs postes de télé dehors et inviter les voisins. Nous étions subjugués de les observer. Peut-être cela existe-t-il dans d’autres pays latins, je ne sais, mais je comprends mieux maintenant la signification de ce phénomène à Montréal quand les Italiens klaxonnent en hurlant dans leur voiture et en brandissant leur drapeau lors des victoires de leur équipe. Ils sont en contact direct avec leur culture, drôlement plus imprégnée que la nôtre.

Oui, la St-Jean et quelques autres événements épars resserrent la fibre de l’âme québécoise, mais le reste de l’année, nous demeurons profondément plus « Américains » qu’autre chose. Nous perdons le sens de notre culture.

Famiglia, Sex an the City

La famille est très profondément ancrée dans les traditions en Italie. Un Italien est très lié à sa famille avec qui il entretient de nombreux contacts. En affaires, un Italien préfèrera toujours traiter avec un membre de sa famille, en qui d’emblée il a confiance, qu’avec un étranger. Les maisons italiennes hébergent donc de grandes familles, les enfants recueillant bien souvent leurs parents lorsque ceux-ci se font vieux. Cette tradition a néanmoins tendance à perdre du terrain au sein de l’Italie moderne.

La mamma en est généralement le centre, elle détient une autorité conséquente et un grand pouvoir d’influence. C’est ce que j’ai pu constater hier soir lorsque j’attendais que parte le petit train dans lequel j’étais tranquillement assise à observer les alentours et le comportement des gens qui passaient quand soudain, mon regard fut attiré par un événement que je n’avais jamais vu. Une femme d’environ 65 ans se tenait au coin d’une rue avec un jeune homme d’environ 30 ans. Ils jasaient quand tout à coup, elle lui a foutu une claque en plein visage, slack!, et s’est mise à le sermonner. Le type, plutôt molasson, essayait de s’expliquer. Puis, elle a sorti un mouchoir et lui a essuyé le visage. Personne autour d’eux n’a semblé faire de cas de cette situation. Ça m’a fait rire parce que jamais au Québec je n’ai vu de femme frapper son enfant de 30 ans en public! La mamma, elle avait du nerf!!

J’ai souvent remarqué en Italie et en Sicile que la mère semble effectivement détenir le gros de l’éducation des enfants. Lorsque les maris sont présents, ils ne lèvent la voix que pour calmer l’enfant ou ils le cajolent, mais la majorité du temps les hommes discutent entre eux tandis que les femmes se regroupent ensemble avec les enfants et les laissent s’agiter jusqu’à plus soif puis elles sévissent sous un tonnerre de cris. C’était un peu la même situation que je voyais en Espagne : les hommes sont plus souvent attablés aux terrasses ou dans les parcs et ils parlent, parlent, parlent… et on se demande où sont les femmes? Probablement en train de laver le linge ou préparer les repas… Nous avons trouvé quelques places pour faire laver le linge mais ce sont toujours des femmes qui y travaillaient.

Lu dans un article aujourd’hui que « les résultats d’une étude récente, “SorElle d’Italia”, commandée par le mensuel Elle [en italien] et publiée le 17 janvier 2011, disent que dans 47 % des cas, en Italie, ce qui rend les trentenaires heureuses, c’est leur relation de couple et, pour 11 % d’entre elles, le fait de se considérer comme de bonnes mères (je serais curieuse de voir les chiffres au Québec). Comme si, en l’espace d’une génération, le modèle féminin était passé de celui de Sex and the City à celui de Mad Men [série américaine dont l’action se déroule à New York au début des années 1960]. Une tendance confirmée par la mode, qui remet au goût du jour les jupes volantes et la lingerie vintage, prisées par ces “femmes modèles à l’ancienne”. »

J’ai ainsi pu constater que beaucoup de jeunes filles, dès la quinzaine, en Italie et en Sicile, portent des tops qui laissent montrer une grande partie de leur soutien-gorge, chose qu’on voit peu au Québec. Il y a eu bien sûr la mode du J-string (venue de Britney Spears, je crois) mais je pense qu’elle n’est plus généralisée maintenant chez nous. De toute façon, les écoles ne permettent pas ce genre d’accoutrement et j’en ai peu vu dans les rues de Montréal.

Les Italiennes sont fières de leur poitrine et ne manquent pas d’occasion de la montrer même si c’est parfois d’un goût douteux. C’est quand même un beau contraste pour un pays si traditionnel. Cela démontre qu’ici aussi, il y a une crise de valeurs qui sépare les générations. Beaucoup de femmes âgées de cinquante ans et plus, surtout dans les petites villes et villages, ressemblent encore à Ginette Reno dans le film Léolo. La vraie mamma italienne telle que véhiculée dans les films cultes italiens!

Je comprends un peu mieux pourquoi nous tranchons sur les Italiens dans notre habillement. Le Québec demeure encore « frileux » à exposer sa sexualité même si nous en parlons plus ouvertement que d’autres pays. Faut dire que la femme est plus louangée par les hommes en Italie qu’au Québec. Ça donne envie de s’exposer… Les Italiens démontrent facilement leur intérêt devant la gente féminine (je ne sais pas ce leur « technique » devient après le mariage, sont-ils aussi entreprenants?), alors qu’au Québec, je déplore depuis longtemps que les hommes ne savent plus « cruiser ». Pour ma part, je ne me suis pas fait siffler ici, probablement parce que je n’ai pas le type méditerranéen et que j’étais avec un homme. Je n’en garde aucune amertume car l’homme le plus important est à mes côtés présentement et il continue de me charmer après toutes ces années! Chéri, plus que 5 jours avec toi…

En passant, 35 à l’ombre aujourd’hui… fait chaud en cimonaque!

De Tropea à Scilla

La journée d’hier a été consacrée à la farniente et la lecture pour moi et quelques petits travaux sur le bateau pour Serge. Il n’est pas rare que je fasse une petite sieste l’après-midi, surtout que la chaleur est intense dans le sud de l’Italie. De toute façon, tout est fermé durant cette période de la journée et réouvre vers 16h.
Nos voisins de quai sont un jeune couple, Flavio, un Italien qui parle assez bien le français, et Delphine, une Suissesse francophone. Autrefois opticiens, ils ont tout abandonné il y a 10 ans pour travailler sur des voiliers, lui comme skipper, et elle comme cuisinière et hôtesse. Ils reçoivent des gens qui ont loué leurs services pour visiter les environs. Nous les recevons pour l’apéro et nous passons une soirée très agréable avec eux. Ils nous racontent qu’auparavant, ils ont travaillé pour un propriétaire qui avait un bateau à moteur de 62 pieds. Ca coûtait 24,000 euros par semaine pour louer le bateau pour des vacances et les gens devaient payer le carburant en plus, soit 300 litres à l’heure pour faire rouler le bateau. Il y en a qui ont vraiment de l’argent! Comme les gens paient cher pour ce type de vacances, ils s’attendent à ce que tout soit parfait et leurs exigences sont parfois loufoques ou encore un peu inconscientes, comme lorsque le temps est moins beau et qu’il est préférable de rester à quai et que les gens veulent parfois quand même sortir en mer.
Nous parlons aussi de notre coin de pays, le Québec, et des grandeurs et misères qui l’occupent, tout comme dans leur coin de pays. Les rencontres faites au hasard sont souvent chargées de belles surprises et nous espérons qu’ils répondront un jour à notre invitation de venir visiter le Québec.
Aujourd’hui, nous avons quitté Tropea pour se diriger vers Scilla d’où l’on voit le détroit de Messine qui sépare la Sicile de la région de Calabre. Une heure après notre départ, je descends dans le carré et constate qu’il y a de l’eau par terre. Serge vient voir pour se rendre compte qu’il y a une fuite d’eau dans le système de refroidissement du moteur. Nous arrêtons ce dernier, et je prends la barre pendant que Serge colmate le tout. Un quart d’heure plus tard, nous reprenons notre route et tout se passe bien durant les 5 heures restantes. Nous arrivons à Scilla et découvrons ses maisons en bordure de mer, mais pas de quai où s’amarrer. Par contre, il y a des bouées et un gentil garçon, Antonio, vient nous aider et nous propose de nous amener à terre en lui téléphonant, si l’envie nous prend de visiter Scilla, ce que nous ne manquerons pas de faire plus tard dans la journée.
Scilla est une petite ville typique du bord de la mer où tout est intégré à même les maisons. Par exemple, les bateaux sont directement tirés par une corde dans les cours des maisons. Aspect assez spectaculaire sont les bateaux de pêche à l’espadon. Il s’agit d’embarcations d’une bonne grosseur avec une tourelle d’une hauteur de 70 à 100 pieds, au bout de laquelle se tient le capitaine d’où il manœuvre le bateau à la recherche d’espadons dormant à la surface de la mer, d’où l’utilité d’une passerelle à la proue du navire, passerelle qui a une longueur d’environ 60 à 70 pieds. Un homme se tient au bout de cette passerelle, l’idée étant d’harponner l’espadon qui sommeille sur les flots. Nous espérions voir un de ces bateaux de près et notre désir a été exaucé puisqu’en fin de journée, 2 de ces bateaux sont venus s’amarrer dans le port où nous nous trouvons.

Ce diaporama nécessite JavaScript.